11 mars 2006

Une Virée...

Ce soir au TNT, Jean-Louis Martinelli nous proposait sa mise en scène du texte d'Aziz Chouaki, créée en étroite collaboration avec l'auteur. Le pari était délicat : donner à voir, à percevoir, le désoeuvrement et la misère de la jeunesse algérienne sans sombrer dans le pathos ou au contraire dans l'excès de violence, physique ou verbale. Les deux écueils ont, de mon point de vue, été évités. Le décor béton+béton éclairé par une lumière crue créait déjà un certain malaise. Les trois personnages, déclinaisons du modèle de jeune adulte désoeuvré, sans argent, sans femme et sans réel espoir d'avoir un jour l'un ou l'autre, pleurent et rient de leur situation, s'aiment et se détestent, s'embrassent et s'agressent tour à tour, paumés dans leur prison à ciel ouvert, avec l'autre, l'alter ego, à la foi frère et miroir de sa propre misère. Le texte est souvent très fort, dialogues vifs ponctués à intervalles réguliers de monologues très écrits, dans lesquels on retrouve la langue de Chouaki, celle qu'on a aimé dans "Les Oranges" en particulier. Ces digressions "poétiques" mettent en perspective ce qui se passe sur la scène, cette misère et cette violence du quotidien, avec la situation politique, économique et sociale du pays. A l'arrivée, cela donne un spectacle fort et très émouvant, même si l'on met un peu de temps à entrer dedans.